L’idée lancée par Donald Trump de déplacer les habitants de la bande de Gaza vers la Jordanie et l’Egypte s’est heurtée à de nouvelles critiques durant toute la semaine dernière, pendant que des milliers de Palestiniens continuaient à rentrer dans le nord du territoire, en ruines après 15 mois de guerre.
L’idée de Donal Trump de déplacer les Palestiniens vers d’autres nations suscite un tollé.
Depuis lundi dernier, des centaines de milliers de déplacés ont regagné cette région où s’étaient concentrés ces derniers mois les combats les plus violents, à la faveur du fragile cessez-le-feu entré en vigueur le 19 janvier et destiné à entrevoir une fin à la guerre entre Israël et le Hamas.
L’ONU a estimé ce mardi 28 février dernier, à au moins 376.000 le nombre de Palestiniens, pour moitié des hommes, rentrés depuis la veille dans le nord de Gaza après avoir parcouru des kilomètres dans un paysage dévasté.
Alors que la quasi-totalité des 2,4 millions d’habitants de la bande de Gaza assiégée par Israël, ont été déplacés par la guerre, le président américain avait avancé samedi l’idée de les faire migrer vers la Jordanie et en Egypte afin, selon lui, de « faire le ménage » dans le territoire.
Lundi, Donald Trump a réaffirmé que les Gazaouis « pourraient vivre dans des zones beaucoup plus sûres et peut-être beaucoup plus confortables ».
Le président américain, dont la proposition a déclenché une volée de dénonciations dans le monde arabe et en Europe, doit recevoir le 4 février prochain Benjamin Netanyahu à la Maison Blanche, a annoncé mardi le bureau du Premier ministre israélien.
Le Hamas au pouvoir à Gaza depuis 2007, tout comme le président palestinien Mahmoud Abbas, ont rejeté toute idée de déplacement forcé, associée pour les Palestiniens à la « Nakba », ou « Catastrophe » en arabe, le nom donné au déplacement de masse qui a suivi la création d’Israël en 1948.
La Jordanie, qui accueille déjà environ 2,3 millions de réfugiés palestiniens, ainsi que l’Egypte ont également rejeté catégoriquement cette idée. Le Caire a démenti dès le mardi 28 février des informations de presse selon lesquelles Donald Trump se serait entretenu avec son homologue Abdel Fattah al-Sissi. Depuis, les dirigeants égyptiens et jordaniens ont été rejoins par l’Arabie Saoudite et le Qatar.
Vers une position internationale consensuelle
Le Qatar, qui a joué un rôle de premier plan dans les négociations ayant abouti au cessez-le-feu, a aussi réitéré son soutien à la solution à deux Etats, israélien et palestinien, comme « seule voie à suivre pour résoudre la question palestinienne ».
Pour la France comme pour le chancelier allemand Olaf Scholz, une expulsion de la population de Gaza serait « inacceptable » et constituerait selon Paris, « une entrave majeure à la solution à deux Etats ».
Le ministre israélien d’extrême droite Bezalel Smotrich a en revanche affirmé mardi, qu’il travaillait avec Benjamin Netanyahu « pour préparer un plan opérationnel et garantir que la vision du président Trump se concrétise ».
Mais dans les ruines de Gaza, les déplacés espèrent que le cessez-le-feu mettra fin à des mois d’errance et leur permettra de retrouver leur maison, même détruite.
« Nous déclarons à Trump et au monde entier : nous ne quitterons pas la Palestine ou Gaza, peu importe ce qui arrive », a affirmé à l’AFP un déplacé originaire de la ville de Gaza, Rashad al-Naji.
« Je suis heureux d’être de retour chez moi », a témoigné Saif Al-Din Qazaat, qui depuis dort sous une tente près des ruines de sa maison. « J’ai entretenu un feu toute la nuit près des enfants pour leur tenir chaud. Ils ont dormi tranquillement malgré le froid, mais nous n’avons pas assez de couvertures », ajoute cet homme de 41 ans.
Un bilan de victimes qui s’alourdit tous les jours
La première phase du cessez-le-feu doit durer six semaines et permettre la libération de 33 otages retenus à Gaza, contre quelque 1.900 Palestiniens détenus par l’Etat Hébreu.
Sept otages israéliennes sont déjà rentrées chez elles, contre la libération de 290 Palestiniens. Trois autres otages doivent être libérés jeudi et trois samedi, mais Israël a annoncé lundi que parmi les 26 otages restant à libérer pendant cette première phase, huit étaient morts.
Le frère d’un otage probablement mort a déclaré mardi, préférer la libération d’un otage vivant à la remise de la dépouille de son frère.
« Laissez les morts et ramenez à leur place huit otages en vie, je suis prêt à renoncer au corps de mon frère, sortez-les de l’enfer », a affirmé Dani Elgarat, dont le frère Itzik fait partie des 251 personnes enlevées le 7 octobre 2023, lors de l’attaque menée par le Hamas en Israël, qui a déclenché la guerre.
Les modalités de la deuxième phase de l’accord, visant à la libération des derniers otages et la fin définitive de l’actuel conflit, doivent être négociées durant la première phase en cours.
La dernière étape doit porter sur la reconstruction de Gaza et la restitution des corps des derniers otages morts en captivité.
Rappelons que l’attaque du 7 octobre 2023 a entraîné la mort de 1.210 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP basé sur des données officielles israéliennes.
L’offensive lancée en représailles par Israël dans la bande de Gaza, a quant à elle fait au moins 47.317 morts, également en majorité des civils, selon les données du ministère de la Santé du gouvernement du Hamas, jugées fiables par l’ONU.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a souligné mardi dernier, que bilan officiel donné par le ministère de la Santé était « celui des morts recensés dans les morgues et les hôpitaux ».
« A mesure que les gens retrouveront leurs maisons, qu’ils commenceront à chercher leurs proches sous les ruines, ce chiffre devrait augmenter », a déclaré son porte-parole Christian Lindmeier.